La station préhistorique du bois de la Houssière Braine-le-Comte (Hainaut) Belgique.

Par Jacques BAUDET in «Société préhistorique Française » 1946, tome 43, N. 3-4. pp. 120-124.

Le bois de la Houssière, situé à l’Est de Braine-le-Comte, couvre un plateau qui atteint, au point qui nous intéresse, l’altitude 155. Sur le flanc Ouest de celui-ci, à proximité de la route venant de la ville, on trouve une grande exploitation de sable éocène. On donne à cette carrière le nom du hameau le plus proche dit « Le Marouset ». Elle entame le plateau d’Ouest en Est.

Le Lutécien y est traversé sur une vingtaine de mètres. Nous devons à M. Legrand, ingénieur à Louvain, l’étude approfondie du Tertiaire. A la surface de celui-ci, on remarque une couche importante de Pléistocène

La coupe donne, de bas en haut :

1° De l’éocène non altéré, puis une épaisseur de 5 à 6 mètres de couches rubéfiées chargées d’hydroxyde ferrique, ou « limonite ce qui témoigne en faveur d’une longue exposition à l’air libre, c’est à-dire une émersion prolongée. Cette période continentale est probablement post-pliocène.

2° Vient ensuite une couche argileuse contournée, sans stratification, contenant des blocs roulés et altérés de grès bruxellien à tubulures d’annélides. Ce dépôt augmente d’épaisseur vers l’Ouest, c’est-à-dire du côté même de la pente; où il est enfin recoupé par le loess-lehm de lavage post-glacial.

Il  semble bien que cette couche soit le résultat de solifluxions glaciales, probablement de la période Rissienne, ou peut-être prépliocène, comme semble le témoigner le cailloutis qui la surmonte.Ce niveau n’a fourni aucun instrument ni ossement fossile.

3° Immédiatement au-dessus se trouve un cailloutis composé de galets siliceux semblables à ceux qui remplissent les couches diestiennes (Pliocène). C’est-à-dire des petits galets ronds à surface cacholonisée de la grosseur d’un œuf de poule.

Mais ici ces galets forment un cailloutis nettement quaternaire, d’une phase interglaciaire postérieure au niveau soliflué. Cette couche a fourni de l’industrie à instruments relativement grossiers, taillés sur grands éclats, avec bulbe bien marqué accompagné d’esquilles satellites.

Le talon du plan de frappe n’a pas été préparé. Ce travail fait à la fois penser au Clactonien par sa technique, au Levalloisien ancien par la grandeur des éclats débités et un peu au Mesvinien de Rutot, considéré actuellement comme faciès local évolué du Clactonien. Notons toutefois que l’angle formé entre le plan de frappe et celui d’éclatement est beaucoup moins ouvert que dans les types du Clactonien typique.

Il  semble qu’il soit permis de penser que nous avons ici une industrie de transition entre le Clactonien ou faciès belge mesvinien et le Levalloisien.

En nous référant aux études les plus récentes, on peut aussi déduire que nous sommes en présence d’un niveau interglaciaire pouvant être considéré comme Riss-Wurm.

4° Au-dessus de ce cailloutis se trouve une couche d’un beau loess jaunâtre où furent recueillis des instruments d’une technique différente. L’industrie y est moins volumineuse, débitée en lames plus petites avec un talon bien préparé qui laisse supposer un stade plus récent. Nous n’y avons hélas pas encore recueilli de pièces typiques permettant une plus précise identification.

Les nuclei récoltés dans un niveau parallèle sont soigneusement travaillés, le débitage est plus précis, et d’une habileté plus grande. D’autre part, la patine moins accentuée dénote un climat où l’altération fut moins intense. La pellicule superficielle n’a subi aucune trace d’hydratation et même, semble-t-il, de déshydratation avec précipitation de silice colloïdale.

Il semblerait que nous sommes ici en présence d’un faciès levalloisien final ou d’Aurignacien naissant. Sa position dans le loess nous reporte à l’époque finale du Wurm, ou Weichel. Nous nous trouvons peut-être aussi à la phase légèrement plus tempérée d’Achen dont Schmidt nous entretint dès 1912 dans son « Die Diluviale Vorzeit Deutschlands.

5° Au-dessus de cette couche de loess en place, dont nous aurons l’occasion de reparler plus loin, on remarque un niveau assez épais de limon de lavage ou loess-lehm qui recoupe les dépôts pléistocènes précédemment décrits, pour enfin atteindre l’éocène à l’extrême Ouest du gisement. Ce dernier niveau contient, comme il fallait s’y attendre, du Néolithique. Nous sommes arrivés au Postglaciaire. Notons la présence de fragments de haches polies trouvés dans cette couche. Ils sont en silex de Spiennes et l’examen de l’un d’entre eux révèle l’empreinte externe d’un fragment de coquille d’Inoceramus de la craie sénonienne.

Afin de nous conformer aux données les plus récentes, nous avons procédé à quelques essais sur le loess et le loess-lehm de cette coupe.

Il est regrettable que nous n’ayons pas eu la possibilité de rechercher et étudier les minéraux lourds. Un examen convenable de l’aspect externe des particules aurait aussi été nécessaire.

Toutefois il nous a semblé utile de signaler ce gisement où il est possible d’observer les phases suivantes :

A. Le sommet de l’éocène fortement rubéfié. (Phase interglaciaire humide et chaude).

B. Argile solifluée (Phase glaciale). Tertiaire ou quaternaire.

C. Phase interglaciaire à industrie de transition anté-levalloisienne.

D. Phase froide du loess avec faciès d’industrie plus récent.

E. Phase post-glaciaire du loess-lehm avec Néolithique.