Dès la mise en service du canal de Charleroi, l’organisation du halage rencontra de grandes difficultés qui s’amplifièrent avec l’ouverture des canaux-embranchements et l’augmentation du trafic. Au début de l’exploitation, la direction du canal avait institué, à l’essai, une compagnie de haleurs. Malgré d’excellents résultats, des voix s’élevèrent pour qu’une autre formule, introduisant l’emploi de chevaux, soit appliquée.

Après consultation des chambres de commerce, le halage fut proclamé entièrement libre. Ce principe fut entériné par l’A.R. du 28juin 1833. Ce dernier, en son article 17, accorda aux bateliers le droit de prendre des haleurs où bon leur semblerait. Provisoirement, le halage se ferait exclusivement par des hommes (art. 16).

Cependant, le halage par chevaux, expérimenté quelques mois entre la Sambre et le souterrain ainsi qu’entre la 40e écluse et Bruxelles, s’avéra avantageux. Sur la partie intermédiaire, les haleurs furent conservés en raison du grand nombre d’écluses à franchir. Malgré tout, la liberté du halage ne produisit pas les résultats escomptés. En effet, hommes et chevaux étaient enlevés par les travaux houillers qui leur procuraient un prix de journée plus élevé. De ce fait, la concurrence ne joua pas. Les hommes disponibles pour le halage en profitèrent pour imposer des augmentations de salaire provoquant une hausse du prix de la tonne transportée.

A la fin de l’année 1837, les commerçants et les propriétaires de bateaux réagirent si vivement que le Ministre des Travaux publics, NOTHOMB, chargea VIFQUAIN d’examiner leurs griefs et de rechercher les moyens d’y remédier. L’examen de ces réclamations mit en évidence la nécessité d’organiser un service spécial et régulier de halage au moyen d’hommes et de chevaux. Les commerçants, les propriétaires de bateaux et la société concessionnaire adhérèrent à ce mode de traction.

En conséquence, VIFQUAIN proposa au Ministre, par son rapport du 15janvier 1838, de faire de l’entreprise de halage l’objet d’une adjudication publique. Il présenta en même temps un projet de cahier des charges qui stipulait entre autres :

1. que l’entrepreneur devait posséder les moyens suffisants pour l’achat et la mise en oeuvre du matériel et des chevaux nécessaires, ainsi que pour l’organisation du personnel;

2. qu’il serait obligé de haler sans aucun retard les bateaux prêts à la marche

3. que les bateliers auraient le droit de se procurer les moyens de traction nécessaires et que, dans le cas où l’entrepreneur ferait défaut, ils pourraient réclamer des dédommagements ;

4. qu’il était formellement défendu de favoriser la marche d’un bateau en particulier;

5. que le gouvernement aurait le droit de rompre le marché après avoir simplement constaté la négligence ou le manque de moyens de l’entrepreneur;

6. qu’il déléguerait une autorité pour juger sommairement et sans retard les contestations entre l’entrepreneur et les conducteurs de bateaux.

Ce cahier des charges fut approuvé par le Ministre le 25 août 1838. L’adjudication eut lieu le 6 novembre 1838, deux soumissions ayant été présentées, l’une couvrant le halage depuis la Sambre jusqu’à Seneffe, l’autre de Seneffe à Bruxelles. Ces deux soumissions furent approuvées le 15 février 1839, le nouveau système de halage étant mis en application dès le 21février 1839.

Le trafic, on l’a vu, étant en constant progrès, surtout depuis la mise en service des canaux-embranchements le 5 août 1839, il fut décidé de stimuler l’activité de l’entrepreneur en lui accordant une prime de 1 F (A.R. du 3 avril 1841) par relais de halage parcouru, à chaque bateau excédant le nombre de 18 par jour passant en descente à la 54ème écluse du canal à Bruxelles. Cette mesure eut un effet bénéfique sur l’activité générale du canal.