Le Congrès de Vienne en 1815 consacrait la décision des grandes puissances prise à notre égard à Chaumont dans un article secret (1er mars 1814). Celui-ci précisait que “La Hollande ,Etat libre et indépendant sous la souveraineté du prince d’Orange” recevrait un “accroissement de territoire” et “une frontière convenable”.

Le sort des territoires belges était scellé. L’ »Amalgame” introduisait l’ère hollandaise et orangiste.

PIRENNE décrira ainsi le régime : “Vers 1821, après 6 ans d’exercice, le gouvernement de Guillaume restait aussi impopulaire qu’à ses débuts et pourtant personne ne niait qu’il ne fût bienfaisant. La crise industrielle au milieu de laquelle il s’était constitué avait pris fin et une nouvelle période de prospérité s’ouvrait pour le pays” “De nouvelles usines s’ouvraient, la population urbaine augmentait grâce à l’afflux des ouvriers de la campagne”.

“Enfin, les travaux publics conçus suivant un plan d’ensemble galvanisèrent, à mesure de leur réalisation, un mouvement économique qui, jusqu’à la séparation des deux parties du royaume, s’amplifia d’année en année. Le syndicat d’amortissement, créé en 1822, et qui devait plus tard fournir à l’opposition tant de griefs contre le Roi, se fit accepter tout d’abord par la facilité qu’il offrait aux industriels de l’intéresser à leurs affaires. Le syndicat possédait l’administration des domaines, celle des capitaux avancés par l’Etat pour l’encouragement des fabriques, de la pêche et de l’agriculture et celle de la caisse de consignation”.

C’est au beau milieu de cette prospérité recouvrée que le gouvernement des Pays-Bas, en la personne du Roi, reçut de nombreuses pétitions, revêtues des signatures des principaux producteurs et consommateurs belges et hollandais. Elles réclamaient la reprise des études du canal, études tant de fois abandonnées.

Plusieurs projets furent proposés, dont celui de A.J.BARTHELEMY, membre de la seconde chambre des Etats Généraux et conseiller de régence à Bruxelles. “Il usa de toute son influence pour faire décider l’exécution d’un canal pour l’acheminement de la houille dont le coût de transport au moyen de chariots tirés par des chevaux relevait le prix d’une façon insupportable”.

BARTHELEMY étudia un canal de réalisation peu coûteuse, devant permettre l’acheminement économique du charbon.

“Le canal projeté présentait une largeur de 20 à 30 pieds et une profondeur de 5 pieds; de chaque côté, un chemin de halage de 8 pieds de largeur devait servir à la circulation des chevaux et des cochers, un cheval tirant un convoi de 10 à 20 bateaux. Ces derniers auraient mesuré 20 pieds de long, 4 pieds de large et 2 pieds 6 pouces de tirant d’eau. Ils auraient pu porter 5 tonnes chacun. Chaque jour, 240 bateaux partis de Charleroi seraient arrivés à Bruxelles, y amenant donc 1200 tonnes de charbon”.

Pour franchir les différences de niveau, BARTHELEMY proposait de ne pas utiliser les sas d’écluses “qui étaient coûteux, lents à franchir et qui ne permettaient que le rachat d’une différence de 8 à 12 pieds au maximum”.

Il recommandait par contre d’utiliser des plans inclinés, imaginés en Angleterre, par REYNOLDS et FULTON, ouvrages qui permettaient de racheter 100 pieds de différence de hauteur en un seul ouvrage (fig. 13).

“Le plan incliné à double coulisse s’étendait entre deux biefs en se prolongeant de 60 pieds dans chacun de ceux-ci. Une coulisse était destinée au sens montant, l’autre pour la descente; un bateau s’engageant sur le plan incliné devait prendre appui sur la coulisse au moyen de chariots à roulettes. Accroché à un câble raccordé à un tambour à axe horizontal, le bateau était mis en mouvement au moyen d’un contrepoids constitué d’un réservoir qu’on pouvait remplir d’eau à volonté et qui descendait dans un puits d’une profondeur égale à la longueur du rachat”.

“Arrivé au sommet, le bateau s’arrêtait et, à bras d’homme, était poussé dans l’autre bief. Au moment où le contrepoids touchait le fond du puits, une soupape s’ouvrait laissant couler l’eau hors du réservoir. On pouvait éventuellement se servir d’un bateau descendant comme contrepoids, qui réduisait le poids d’eau dans le contrepoids”.

“Les grands avantages revendiqués pour cette solution étaient son faible coût et la consommation réduite d’eau”.

Cette idée fut défendue par un autre représentant de la Nation, membre de la seconde Chambre des États Généraux : GENDEBIEN.

Celui-ci revint à la charge avec le projet de 1656 passant par Nivelles et la Dodaine sur laquelle il prévoyait l’installation de plans inclinés dans le genre des anciens “overdrachten” (fig. 11 et 12) (dont le dernier exemplaire dans nos régions existait encore sur le canal de Loo mais allait disparaître en juillet 1826 pour faire place à une écluse).

VIFQUAIN, dans son rapport au Ministre des Travaux publics, reconnaissait le caractère ingénieux de ce projet d’un canal de très petite section mais le rejetait “en raison des immenses transports que le canal serait appelé à opérer”.D’ailleurs un transbordement à Bruxelles pour les autres destinations eût été trop onéreux.

Un industriel de Nottigham, GREY, qui avait eu vent d’un projet de canal entre Bruxelles et Charleroi, proposa, en 1821,au Roi de Hollande de construire le canal. « Cependant de n’y mettre point d’eau, mais un chemin de fer ». Il ne fut pas suivi dans son idée originale.

Depuis plusieurs siècles le principe du plan incliné était utilisé par les Chinois. Le document ci-contre représente une installation située au nord de la ville d’Ypres sur le canal allant à Nieuport. Cette construction a été réalisée vers les années 1550.